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Le réveil de la Turquie : la sortie progressive hors du camp

 
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Atari
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MessagePosté le: 03 Juil 2010 12:41    Sujet du message: Le réveil de la Turquie : la sortie progressive hors du camp Répondre en citant

Le réveil de la Turquie : la sortie progressive hors du camp occidental


- Extrait GEAB N°39 (15 novembre 2009) -



A la faveur de la crise systémique en cours et de l'affaiblissement rapide de la puissance des Etats-Unis et de l'armature occidentale sur laquelle cette puissance repose, la Turquie est en train de redéfinir fondamentalement ses intérêts géopolitiques majeurs. Les nouvelles priorités en gestation vont constituer d'ici 2012 la plus profonde remise en cause effectuée par Ankara depuis son entrée dans l'OTAN en 1952. Ce processus illustre un retour aux sources de la vision kémaliste des intérêts vitaux de la Turquie (1), c'est-à-dire une rupture par rapport à l'agenda établi pour la Turquie par les puissances dominantes. Il est assez ironique d'ailleurs que ce soient des dirigeants d'un parti d'inspiration religieuse, l'AKP, qui initient cette évolution. Les conséquences géopolitiques, économiques et commerciales de ce changement d'orientation sont considérables puisqu'il remet en cause la vision traditionnelle d'une Turquie pro-occidentale et en attente d'intégration à l'UE.



La Turquie dans son environnement régional - Source : Comité Valmy
Comme souvent dans la région de Méditerranée orientale, c'est la relation à Israël qui est un indicateur fiable de l'orientation des relations d'un pays avec le camp occidental puisque depuis plus d'une décennie, le camp occidental se définit par une ligne directrice Washington/Tel Aviv. Or, en la matière, depuis quelques mois, la Turquie a entrepris de s'écarter fortement de cette ligne directrice dont elle avait au contraire tenue à se rapprocher sans cesse depuis plusieurs années. La violente attaque de Gaza par l'armée israélienne en Décembre 2008 a constitué l'évènement qui marque le début très visible de ce changement de ton d'abord, puis d'orientation. En effet, depuis cette date, Ankara a progressivement entrepris de refaire en marche arrière tout le chemin fait ces dernières années en matière de coopération avec l'état hébreu, tant sur le plan diplomatique que sur le plan militaire. Les derniers exemples en date ont été la décision d'arrêter d'autoriser l'entraînement de l'aviation israélienne dans le ciel turc et le refus qu’Israël participe aux manœuvres de l'OTAN d'Octobre 2009 (2), pour annoncer dans la foulée des manœuvres conjointes avec la Syrie (3). On est ici déjà très loin du comportement militaro-stratégique attendu d'un allié fidèle des Etats-Unis et d'un membre éminent de l'OTAN.

Pourtant, cette évolution sur le plan géo-stratégique régional est en gestation depuis la chute de l'URSS, quand le « cul de sac » dans lequel se trouvait la Turquie depuis des décennies de Guerre Froide est redevenu un vaste espace ouvert où le potentiel d'expansion culturel, économique et commercial est immense. Déjà sous la Turquie « aux ordres » perçait un pays de plus en plus réticent à devoir se travestir dans l'uniforme d'un Occident aux visées régionales de plus en plus étrangères aux intérêts turcs (4). Tant qu'il y avait la Guerre Froide et la menace soviétique aux frontières du pays, la Turquie acceptait volontiers d'être une « Tour occidentale » sur l'échiquier moyen-oriental. Mais depuis 1989, la divergence d'intérêts entre la Tour et le Roi ou la Reine s'accroît chaque année un peu plus fortement, ce qui présage mal de la suite du jeu à deux niveaux :

. d'une part, la Turquie va être de plus en plus réticente aux impulsions de Washington comme le prouvent une série croissante de réactions négatives (5), provoquant une montée de tensions hostiles à Ankara au sein même de l'Alliance. On constate désormais, chose nouvelle, des interrogations publiques sur la légitimité de la Turquie au sein de l'OTAN, exprimées par des leaders d'autres Etats membres de l'Alliance.

. d'autre part, l'action de l'Alliance et/ou de Washington dans la région va être de plus en plus handicapée par une Turquie réticente à obéir, et qui, au contraire, développe ses propres logiques stratégiques régionales éventuellement opposées à celles de l'Alliance. Les bonnes relations d'Ankara avec Téhéran (6) en constituent un autre exemple flagrant : on est loin ici de toute idée de sanctions renforcées ou d'embargo effectif, pourtant vigoureusement prônés par Washington.

En un mot comme en cent, la relation Turquie/OTAN est en train d'atteindre un point de non-retour. Le cas turc ne fait d'ailleurs qu'illustrer la problématique plus générale d'une Alliance en pleine désintégration (thème déjà analysé dans des GEAB précédents), dont le leader n'a plus ni la vision, ni les moyens permettant d'encadrer tous les membres.

Ironie de l'Histoire, pour LEAP/E2020, c'est l'autre volet de l' « ancrage » de la Turquie à l'Occident, à savoir la promesse d'accession à l'Union européenne, qui est probablement un facteur décisif permettant cette sortie du camp occidental. C'est en effet cette promesse intenable que l'absence de courage et d'imagination des dirigeants européens a conduit à mettre en mouvement, via l'ouverture formelle d'un processus d'adhésion en 2005, qui a créé les deux grandes conditions permettant ce nouveau cours de la politique étrangère turque :

. d'une part, les contraintes démocratiques d'accession à l'UE ont obligé progressivement les militaires turcs à regagner leurs casernes et à y rester. Ils avaient l'habitude depuis des décennies de diriger le pays dans l'ombre de politiques fantoches, les congédiant si nécessaires quand les urnes donnaient des résultats qui les indisposaient. Se posant en garant de l'héritage d'Atatürk, ils en profitaient surtout pour contrôler le pays et profiter au maximum de la manne déversée par l'OTAN, l'UE et les Etats-Unis, rémunérant leur fidélité au camp occidental (7). Leur affaiblissement a ainsi privé l'Occident de ses plus fidèles alliés au sein de la société turque. Encore un exemple de l'ironie de l'Histoire.

. d'autre part, les réticences évidentes de l'UE, et en particulier de l'immense majorité de son opinion publique (Cool, face à la perspective, même lointaine, d'un élargissement à la Turquie sont apparues clairement aux citoyens turcs depuis quatre années. Parallèlement, la découverte brutale que les soi-disant « négociations d'adhésion » (9) n'étaient pas de vraies négociations, mais au contraire une obligation bien réelle pour la Turquie d'adopter intégralement les 90.000 pages du corpus législatif, moral, commercial, économique et culturel de l'UE (seul le calendrier de l' « acquis communautaire » est en fait négociable), ont déclenché un sentiment populaire de rejet face à ce qui est apparu comme un « colonialisme par voie légale ». Dans les générations turques des moins de quarante ans, petit à petit, s'est ainsi faite jour la conviction que les Européens ne voulaient pas d'eux et que leur pays s'était engagé dans une impasse. Cette prise de conscience a constitué un phénomène essentiel car il a mis fin à quarante ans de domination sans partage d'un discours officiel faisant de l'entrée dans l'Europe le seul avenir souhaitable pour le pays. Et simultanément, elle a apporté au parti musulman au pouvoir, qui ne s'était rallié que contraint et forcé au projet d'adhésion à l'UE (10), un nouveau courant d'opinion, non religieux, mais dorénavant opposé (ou au moins réticent) au processus d'accession communautaire.

De la Russie, dont les ressortissants se bousculent sur les plages turques à l'Asie centrale où Ankara conduit une politique culturelle et commerciale dynamique en direction des pays turcophones, en passant par l'Iran et la Syrie, la Turquie développe à grande vitesse une nouvelle diplomatie qui tente de faire la synthèse entre l'espace politico-historique de l'héritage ottoman, la proximité religieuse musulmane et ses intérêts propres de puissance régionale et son statut de point de passage privilégié. Le tout est joué via des effets de balanciers où l'OTAN et l'UE sont de plus en plus des éléments du jeu diplomatique d'Ankara, et non plus une donnée fondamentale (comme ce fut le cas pour l'OTAN) ou un objectif central (comme ce fut le cas pour l'UE).

Que les Américains et les Européens ne se méprennent pas. Selon LEAP/E2020, il n'y aura pas de retour en arrière. L'OTAN étant de toute manière en voie de désintégration, il n'y a aucune raison pour qu'Ankara ne continue pas son cavalier seul vers une position intermédiaire au centre d'un équilibre géopolitique comprenant la Russie, l'UE, l'Iran et toute puissance influente entre ses frontières sud et l'Egypte (aujourd'hui Washington). Les derniers alliés fidèles de l'OTAN sont les généraux actuels de l'armée turque. D'ici dix ans, vers 2020, ils auront été remplacés par les générations montantes (11) qui plus que d'autres auparavant identifient l'avenir de leur pays à ce mythe du « pont entre l'Orient et l'Occident ». Et un pont n'appartient à aucune des rives qu'il relie, sinon ça n'est plus un pont mais un cul-de-sac (12).




La Turquie au cœur du réseau d'approvisionnement énergétique - Source : JapanFocus, 12/2007
Cela vaut donc aussi pour l'Union européenne. En bonnes bureaucraties, Bruxelles et Ankara vont continuer les négociations d'adhésion, même si la volonté politique n'est plus là. Mais elles n'aboutiront pas et s'enliseront année après année dans l'indifférence générale. Car tout élargissement est toujours le fruit d'une volonté politique, et seulement d'une volonté politique. Or, le principal sponsor de cet élargissement, à savoir Washington, a désormais bien d'autres chats à fouetter et n'a plus l'influence nécessaire pour surmonter l'opposition forte des opinions publiques européennes (il n'arrive même plus à faire rester les troupes européennes en Afghanistan). Et dans l'UE, aucun leader ne peut plus faire de l'entrée de la Turquie un cheval de bataille faute de perdre les élections. Quant à Ankara, un autre avenir que la Turquie européenne est en train de s'imposer. Si l'UE comprend cela assez tôt et offre un partenariat stratégique de haut niveau à la Turquie, ce rêve sera celui d'une Turquie turque, intermédiaire entre les différents pôles qui l'entourent. Si Bruxelles s'enferme dans son projet d'accession, sans autre alternative, elle prend le risque de pousser Ankara vers un rêve opposé, à savoir celui d'une Turquie musulmane. N'oublions pas l'ironie de l'Histoire qui veut souvent qu'on obtienne le résultat diamétralement opposé à celui qu'on poursuit si on oublie de prendre en compte le rêve, les attentes du peuple avec lequel on traite.

En conclusion, pour notre équipe, cette évolution de la Turquie hors du camp occidental, lui même en pleine décomposition, loin d'être inquiétante pour l'Europe, est une facette de la crise systémique globale et de l'effacement progressif des structures léguées par le monde d'après 1945, qui peut permettre aux Européens d'ici 2015 d'avoir comme partenaire une Turquie à l'identité apaisée, apte à être un intermédiaire efficace avec l'ensemble du Moyen-Orient et de l'Asie centrale.




La Turquie : un « pont neuf » (13) entre l'Orient et l'Occident
----------
Notes:

(1) Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne, a en effet pensé et voulu à la fois une Turquie en rupture avec son passé ottoman et une Turquie en rejet des choix effectués pour elle par les puissances dominantes du début du XX° siècle (Royaume-Uni et France en particulier). Son rejet du Traité de Sèvres et de ses conséquences territoriales pour la Turquie en est un exemple flagrant. Dans son testament, il a par ailleurs très bien exprimé quel était le fil conducteur qui pouvait le relier à de futurs héritiers légitimes : « Je ne laisse, en tant qu'héritage spirituel, aucun verset, aucun dogme, aucune règle pétrifiée et figée. Mon héritage spirituel, c'est la science et la raison (…). Tout dans ce monde évolue rapidement. La conception du bonheur et du malheur se modifie, au fil du temps, chez les peuples et les individus. Affirmer, dans ce contexte, que l'on a su inventer des recettes éternellement valables équivaudrait à renier l'incessante évolution des idées et de la science. (...) Ceux qui, après moi, voudront avancer dans mon sillage, sans jamais s'éloigner de la raison et de la science, deviendront mes héritiers spirituels. » Ce seraient ceux qui notamment auraient le courage de rejeter les recettes obsolètes.

(2) Source : Reuters, 14/10/2009

(3) Et on se souvient certainement de l'esclandre provoquée par le Premier Ministre turc Recep Erdogan à Davos en Janvier 2009 lorsqu'il quitta brutalement l'estrade faute de pouvoir s'exprimer à parité de temps avec le président israélien Shimon Peres. Source : Tribune de Genève, 30/01/2009

(4) Comme l'avaient déjà laissé entrevoir les grandes difficultés de Washington à convaincre Ankara de lui laisser utiliser ses bases en Turquie pour attaquer l'Irak en 2002/2003.

(5) Comme en Avril 2009, quand la Turquie a bloqué pendant plusieurs jours la nomination du nouveau secrétaire général de l'OTAN, Fogh Rasmussen, du fait de son soutien aux médias danois dans l'affaire des caricatures de Mahomet. Source : France 24, 03/04/2009

(6) Le Premier Ministre turc Recep Erdogan insiste pour qualifier d'ami de la Turquie le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et déclare ne pas accepter les deux poids et deux mesures appliquées à l'Iran en matière nucléaire. Source : The Guardian, 26/10/2009

(7) Le FMI a également joué un rôle considérable puisque la Turquie est l'un de ses principaux bénéficiaires depuis des décennies, permettant ainsi à l'Occident de gérer le pays par procuration. La sortie d'un programme d'ajustement du FMI en 2008 correspond également au début de la période la plus visible du nouveau cours de la diplomatie turque. Ankara est désormais d'ailleurs très réticent à s'engager à nouveau dans des prêts avec le FMI. Sources : EurAsiaNet, 02/07/2009 ; BrettonWoodsProject, 17/06/2009

(Cool Désormais une proportion croissante des élites communautaires ne souhaite plus l'entrée de la Turquie dans l'UE. L'évolution récente de la Turquie en matière diplomatique les a convaincus qu'Ankara a dorénavant une vision de l'avenir de mois en moins compatible avec le projet communautaire. Source : EuObserver, 04/04/2009

(9) Depuis des décennies, les élites turques, non démenties bien entendu par leurs homologues européennes, avaient laissé croire aux citoyens turcs que l'accession de la Turquie à l'UE serait un processus où chaque partie ferait en quelque sorte la moitié du chemin. A partir de 2005, ce mensonge a commencé à voler en éclats.

(10) En effet, traditionnellement, la mouvance pro-musulmane en Turquie était opposée à l'entrée dans l'UE. Mais, si Paris valait bien une messe, Ankara vaut bien un élargissement hypothétique.

(11) Le seul risque reste, pour les cinq années à venir, celui d'une tentative de coup d'état militaire lancée par des généraux en fin de course appuyés par Washington. Mais la probabilité en est très faible et il se terminerait probablement comme celui des généraux russes contre Mikhaïl Gorbatchev en 1991.

(12) D'ailleurs la Turquie est un double pont, entre l'Orient et l'Occident, mais aussi entre les riverains de la Mer Noire et ceux de la Méditerranée. Sans oublier, qu'au XXI° siècle, un pont c'est aussi (surtout) un oléoduc ou un gazoduc, deux domaines où la Turquie se positionne centralement avec le projet Nabucco, dont l'Iran est la clé.

(13) Le « Pont neuf » est, comme son nom ne l'indique pas, le plus vieux pont de Paris.


Vendredi 26 Février 2010
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